Entrevue
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Entrevue avec Catherine Girard-Audet, auteure des romans La vie compliquée de Léa Olivier

Afin de souligner l’arrivée de la production télévisée La vie compliquée de Léa Olivier sur les ondes de TFO et sur la plateforme IDÉLLO, nous avons eu la chance de pouvoir nous entretenir avec l'auteure des romans à succès dont la série télé est adaptée : Catherine Girard-Audet.

Bonjour Catherine et merci beaucoup de nous avoir accordé cette entrevue!

Bonjour, avec plaisir!

Dans vos romans, Léa communique beaucoup par courriel. Pourquoi avoir choisi ce médium en particulier?

Je raconte au travers du personnage de Léa ce que j’ai moi-même vécu à l’adolescence quand j’ai déménagé à Montréal, laissant derrière moi mes anciennes amies. Le courriel est le moyen qui m’a permis de garder des liens assez étroits avec elles à l’époque. J’aime le fait qu’il permette d’écrire à la première personne et de se livrer comme nous pourrions le faire dans un journal intime.

Aujourd’hui, les interactions entre jeunes se veulent brèves et instantanées. Quels conseils donneriez-vous à des parents pour encourager leurs enfants à écrire davantage à l’instar de Léa, afin de développer leurs compétences rédactionnelles et pousser leur réflexion?

Lire est probablement l’un des meilleurs conseils que je pourrais donner. Quand j’étais jeune, il n’y avait pas Internet. Lire est un moyen facile d’apprendre, de s’émerveiller devant la richesse de la langue française, de pousser ses connaissances plus loin, de connaître de nouveaux mots et de se familiariser avec des constructions de phrases qui ont de l’allure.  Léa aurait pu écrire avec des acronymes, comme les jeunes le font, c’est-à-dire presque au son. Ça m’arrive parfois moi-même, d’écrire un « PK » au lieu de « pourquoi » quand je texte pour sauver du temps, c’est normal, mais dans mes romans, je prends soin de bien écrire. Je veux montrer qu’il est important d’attacher de l’importance à la langue française. Je suis heureuse si cela aide les jeunes à améliorer leur français ! 

Un autre conseil serait l’écriture d’un journal intime. C’est une façon d’écrire et de se confier sans barrière C’est ce que je faisais quand j’étais jeune. J’ai l’impression que ma fille qui a 6 ans fera la même chose même si elle ne sait pas encore écrire. Je vais pousser pour qu’elle le fasse parce que c’est une façon de pratiquer son écriture, de lâcher un peu les écrans, d’aller en direction du papier. Il n’y a rien de plus sain que de coucher sur du papier ce que l’on ressent, surtout en ce moment,  Ça fait tellement de bien! 

Ma fille est déjà mordue des livres, c’est sûr que c’est mon métier et qu’elle grandit avec moi. Je veux qu’elle lise le plus possible, qu’elle écrive. De se confier à quelqu’un, même si c’est un journal, ça permet justement de peaufiner son écriture, ça fait une GROSSE différence.

Avez-vous des règlements avec votre fille concernant les écrans?

Ma fille n’a jamais été sur YouTube. Avec l’école virtuelle, elle a découvert la plateforme, mais elle n’y a pas accès. Elle a des jeux éducatifs sur la tablette, mais j’essaie d’éviter le plus possible.

(Catherine Girard-Audet travaille sur la suite des aventures de son personnage Léa Olivier. Les deux derniers tomes traitent de la vie de Léa pendant la COVID, le temps d’écran ayant considérablement augmenté depuis le début de la pandémie, et pendant le déconfinement.)

Comment Léa Olivier a-t-elle vécu la période COVID et le confinement?

Ça a été allégé dans Léa parce qu’au moment où je l’ai écrit, je ne savais pas où on allait en être. Je trouvais ça super important d’aborder la question, et que Léa le vive aussi. Je trouvais aussi important le fait qu’elle rate son bal des finissants comme ce que les jeunes ont vécu. Je ne pouvais pas passer à côté de ça; une page d’histoire est en train de s’écrire. Cela étant dit, j’avoue à présent avoir besoin de passer à autre chose dans mon écriture. 

Léa est maintenant en déconfinement léger. Autant j’ai abordé le sujet, autant j’ai maintenant envie que mon écriture serve davantage d’échappatoire. 

La pandémie ne sera pas réglée du jour au lendemain. Léa, tout comme nous, aura encore des choses à vivre. C’est pourquoi on va encore entendre parler du virus dans les prochains romans, mais Léa ne sera plus enfermée chez elle. Il faut que l’histoire évolue et que Léa sorte de son anxiété. Autant Léa est une histoire très réaliste, autant je veux que ça reste du divertissement. Je veux que les lectrices et lecteurs puissent s’évader avec Léa. 

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Les jeunes sont connectés aux réseaux sociaux de plus en plus jeunes. Alors qu’ils sont toujours en processus de construction personnelle et manquent de recul, ils sont exposés à des idéaux de perfection sur la toile ou pire parfois victimes de moqueries. Léa souffre aussi dans l’histoire d’un manque de confiance en elle. Quelle est selon vous la meilleure façon d’accompagner les jeunes à bâtir leur confiance en eux dans un monde connecté en mouvement?

En tant qu’adulte, on ne doit pas tomber dans le tabou. Moi, je le dis, il y a un danger sur les réseaux sociaux. Ce que l’on voit ne reflète pas la réalité. Moi-même, je publie davantage du beau que du laid, même si mes journées en ce moment ne sont pas toujours belles. Souvent je vais me dévoiler dans ma sensibilité et dans ma fragilité, et c’est important de le faire. 

Je dirais aux jeunes : “Regarde autour de toi, tes amis sont beaux dans ce qu’ils sont. Tout le monde a des imperfections et tout le monde a des complexes. Le mieux c’est d’apprendre à vivre avec soi-même. Il faut comparer ça à un conte de fées. C’est correct de regarder tout ça tant que ça ne te crée pas de complexes. Il ne faut pas que tu te compares.” Je sais que c’est facile à dire, et que tout le monde le sait, mais c’est important de le rappeler

Il faut aussi essayer de limiter l’accès aux réseaux sociaux pour les plus jeunes. Si on voit que ça devient malsain, il faut intervenir. La communication est probablement la meilleure façon de gérer ça. Je le réalise parce que parfois même dans mes romans je ne réalise pas la portée que le sujet peut avoir. Par exemple, Maude publie quelque chose à propos de Léa sur les réseaux sociaux. Léa est chamboulée, elle n’en revient pas. Pour moi, c’était anodin, mais il y a plusieurs filles qui m’écrivent pour me dire que ça leur est arrivé et elles me remercient d’en avoir parlé. Après, Léa a une discussion avec sa mère qui remet les pendules à l’heure et qui lui confirme que c’est ça le danger des réseaux sociaux. Les jeunes doivent être conscients que ce qu’ils voient ne reflète pas la réalité et que s’ils ne se sentent pas bien, ils doivent en parler. C’est ça le plus important, surtout en ce moment.

En parlant d’estime de soi, La Vie compliquée de Léa Olivier est une ode à la diversité. En quoi était-il important pour vous de traiter de thématiques telles que la question du genre, l’homosexualité ou encore le racisme? Pensez-vous que ces sujets sont suffisamment abordés dans les contenus jeunesse actuels?

J’ai traversé différentes crises sociales au fil des années et, à chaque fois, ça m’a éveillé sur des situations qui me paraissaient évidentes, mais qui apparemment ne le sont pas pour tout le monde.

Par exemple, dans tous les romans de Léa, je n’ai jamais nommé la nationalité des personnages parce que pour moi, ce n’était pas important. Quand j’ai écrit Léa, [la question de la nationalité] ne m’a jamais traversé l’esprit. Je me suis mise à réaliser qu’il n’y avait pas beaucoup de diversité à la télévision. Et quand est venu le temps de transposer Léa à la télévision, je me suis assise avec les producteurs et j’ai expliqué ma vision en leur demandant de mettre le plus de diversité possible. Ce n’était pas pour être politically correct, mais pour être fidèle à ce que j’ai vécu et fidèle à ce que nous sommes en 2021. 

Croyez-vous que ces sujets sont suffisamment  abordés dans les contenus jeunesse en ce moment?

Ce le sera de plus en plus. Je le vois déjà dans les séries américaines, il y a beaucoup plus de diversité à l’écran et à la télévision québécoise aussi. Même en littérature on* veut promouvoir la diversité le plus possible, mais des auteurs [issus de la diversité], il n’y en a pas tant que ça. Je crois que c’est une sorte de mission sociale qu’on s’est un peu tous donnée. Donc oui, je pense qu’il y a un vent de changement à ce niveau-là. Il y a du travail à faire, comme il y a du travail à faire au niveau du féminisme, de l’environnement, du consentement, etc. Ce sont tous des thèmes qui nous ont bouleversés dans les dernières années que j’aborde dans Léa. On a encore du chemin à faire dans tout, mais je vois qu’il y a quand même des choses qui évoluent beaucoup.

*Catherine est actionnaire de sa maison d’édition.

Votre mot de la fin?

S’il y a quelque chose que 2020 a donné, même en oubliant la pandémie, ça a été une espèce d’éveil collectif. Je dois être optimiste, j’ai confiance que les choses vont continuer de changer dans les prochaines années. Je veux y croire, j’ai besoin d’y croire.

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Quels sont vos projets pour 2021?

J’ai un hors-série qui sort au printemps qui va opposer Maude et Léa, ce qui va être vraiment le fun! Et ensuite, j’ai deux numéros de la série Léa Olivier qui vont sortir, les tomes 14 et 15. Je fais mes romans un peu plus courts et j’en sors plus. Je crois que les jeunes aiment plus ça. Donc mon objectif est d’en sortir un cet été et l’autre, je croise les doigts, au Salon du livre de Montréal. 

Un autre objectif, si la situation me le permet, serait de  pouvoir aller sur les lieux de tournage de la saison 2 de Léa. Le tournage est prévu au printemps. On attend que la vague passe, mais tout devrait bien aller.

Merci de nous avoir accordé de votre temps pour cette entrevue Catherine!

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Catherine Girard-Audet 

Originaire de Québec, Catherine Girard-Audet est diplômée en littérature de l’Université McGill et en traduction de l’Université Concordia. Elle a fait sa marque dans le milieu littéraire en créant le populaire ABC des filles en 2008, un guide pour adolescentes devenu rapidement indispensable. En 2012, elle a publié le premier tome de la série La vie compliquée de Léa Olivier, qui connaît depuis un succès mondial. L’adaptation télévisuelle a d’ailleurs été diffusée jusqu’en Europe!

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