Apprendre par l’expérience : de l’école alternative à la série Nomade en francophonie

Par Étienne Fortin-Gauthier

Étienne Fortin-Gauthier journaliste à ONFR+ raconte comment son passage dans une école alternative où la pédagogie expérientielle était au coeur de ses apprentissages a eu un impact sur sa façon d’apprendre dans son métier et a suscité en lui le besoin d'apprendre par la rencontre de l’autre. Il nous partage les détails du projet Nomade en francophonie qui lui a rappelé son passage à l’école élémentaire.

Après 4 ans à couvrir les enjeux francophones de l’Ontario comme journaliste pour la télévision publique de l’Ontario, TFO, je me suis donné comme défi d’aller explorer le monde francophone. Le voyage d’une vie qui m’a permis de rencontrer des centaines de francophones et francophiles passionnés. Ce périple a donné naissance à la série multimédia Nomade en francophonie, en nomination pour deux prestigieux prix Gémeaux.

Nomade Image principale


Installé à mon bureau au cœur du centre-ville de Toronto, combien de fois ai-je rêvé d’aller explorer la francophonie internationale. À l’aube de mes 34 ans, je me suis dit qu’il était temps de le faire. J’ai élaboré un itinéraire m’amenant dans une quinzaine de pays en faisant du fait français la pierre angulaire de mon aventure internationale.

Apprendre par l’expérience en élaborant mes propres projets. Pas seulement une affaire de journaliste dans la trentaine! C’était central à ma vie, dès l’élémentaire. J’ai fréquenté l’école Jonathan, la première école alternative publique au Québec. Là, c’était à moi de réfléchir à ce que je voulais apprendre et comment j’allais l’apprendre, le tout dans des classes où des jeunes de 5 à 11 ans se côtoyaient et s’entraidaient. Bien souvent, mes projets scolaires s'articulaient autour de rencontres faites hors des murs de l’école. Cette école a évidemment influencé qui je suis aujourd’hui : pour moi, c’est naturel que de faire les choses autrement.

Plusieurs décennies plus tard, mes patrons ont eu la sagesse d’esprit et l’audace d’autoriser mon départ pour un congé sabbatique de 6 mois. Mais en y réfléchissant un peu, on s’est tous vite rendu compte du potentiel journalistique de mon voyage. La série Nomade était née, elle permettrait aux Franco-Ontariens de faire la connaissance de francophones de partout dans le monde.

Apprendre par la rencontre de l’autre

Le fait français est lié de manière intrinsèque au développement de nombreux pays de la planète. Héritage douloureux d’un passé colonial à certains endroits, il est ailleurs une langue d’opportunité économique ou d’espoir. Le secret de mon périple : aller à la rencontre de francophiles locaux pour qu’ils me racontent leurs parcours et me fassent découvrir la culture et l’histoire de leur pays.

À Séoul, un journaliste du service francophone de la radio publique m’a parlé des efforts de la Corée du sud pour séduire l’Afrique, d’où l’adhésion de son pays à l’Organisation internationale de la francophonie. À Pristina, mon interlocutrice m’a raconté son acharnement à poursuivre ses cours de français, alors même que la guerre du Kosovo faisait rage. Au Cambodge, le français s’est imposé comme la langue d’opportunités pour une jeunesse qui rêve de l’ailleurs.

En racontant des histoires humaines, on peut faire comprendre le pouvoir du français pour changer des vies. Comme celle de cette jeune Sénégalaise qui apprend le français pour pouvoir chanter et séduire des publics de partout sur la planète. Ou de cette Cambodgienne qui a pu quitter les dépotoirs meurtriers de Phnom Penh grâce à l’aide d’une ONG francophone. Aujourd’hui, elle organise des tours guidés en français.

Bâtir des ponts

Je crois qu’on peut faire réaliser de façon percutante à un jeune élève franco-ontarien le pouvoir du français en lui permettant d’avoir un correspondant au Cambodge, en Belgique ou au Cameroun. Lui faire réaliser que le français va lui ouvrir des portes dans chaque pays du monde, car c’est une véritable langue internationale. Le français pour se faire des amis, j’y crois. Comme journaliste, j’ai appris beaucoup en faisant ce saut dans le vide. J’ai dû planifier mes tournages et effectuer tout le travail technique sur le terrain moi-même. Puis, j’ai été confronté aux aléas du journalisme dans des pays où les libertés de la presse subissent jour après jour des attaques. Comme ce jour où j’ai dû négocier de longues minutes avec un policier en civil qui voulait me saisir mon matériel de tournage…

L’ailleurs peut parfois faire peur. Mais une fois qu’on y est, on réalise qu’en misant sur les rencontres humaines, on se sent plus vivant que jamais. On se réveille les yeux brillants, excité par les nouvelles découvertes qui nous attendent ou même les nouveaux défis à surmonter. Cette façon d’apprendre est la plus belle : par la rencontre de l’autre, avec authenticité et simplicité. Aller à la rencontre d’un ambassadeur, d’une chercheure ou d’une travailleuse humanitaire.

Avec Nomade, j’ai retrouvé la liberté créative et cette façon d’apprendre acquise tout jeune à l’école Jonathan. Comme cette visite à mon journal local que j’avais organisé, à l’âge 10 ans. Le journaliste que j’avais alors rencontré m’a inspiré et a influencé la suite de mon histoire que j’écris maintenant un peu chaque jour.

 

Pistes pour une utilisation pédagogique de la série

Les journalistes en herbe

Les élèves deviennent des journalistes en herbe et, tout comme Étienne, mènent une enquête sur la place qu’occupe la francophonie dans un pays ou une province de leur choix. Ils font ensuite part de leurs découvertes en créant un récit numérique, en préparant une présentation multimédia ou en écrivant un article journalistique ou un article de blogue.

Voyage autour de la francophonie

Toujours à la manière d’Étienne, les élèves élaborent un itinéraire de voyage pour partir à la découverte de la francophonie canadienne ou mondiale. 

Avant le visionnement d’un épisode

Les élèves votent sur le nombre de locuteurs francophones dans le pays en question (par exemple : entre 0 et 10 000, entre 10 000 et 50 000, 50 000 et plus) et sur les raisons pour lesquelles on y parle et on y apprend le français.

Après le visionnement d’un épisode

  • Revenir sur les prédictions des élèves : leurs hypothèses étaient-elles justes?
  • Discuter et enquêter autour de questions telles que :
    • Qu’est-ce qui vous a le plus surpris en visionnant cet épisode?
    • Pour quelles raisons et depuis quand y a-t-il des francophones dans cette partie du monde? 
    • Qu’est-ce qui motive certains de ses habitants à apprendre le français?
    • Combien de personnes y parlent-elles le français quotidiennement? Combien y ont le français comme langue maternelle? Est-ce que ce nombre augmente ou diminue au fil des années?
    • Quelles autres langues sont-elles parlées par ses habitants?
    • Crois-tu qu’il est important de conserver et protéger le français dans cette partie du monde? Pourquoi?

Liens avec le curriculum Français langue seconde de l’Ontario

Intercultural Understanding: demonstrate an understanding of information in oral French texts about aspects of culture in diverse French-speaking communities and other communities around the world, and of French sociolinguistic conventions used in a variety of situations and communities.

Étienne Fortin-Gauthier
Journaliste et animateur
ONFR+ TFO

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